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Simon Bolivar
La conscience
de l'Amérique

Editions Toute Latitude
192 pp. - 17,80 €
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Les lettres et discours politiques essentiels du Libertador : la porte d'entrée désormais classique dans l'univers de Simon Bolivar et dans la pensée politique contemporaine en Amérique latine. Traduit et présenté par Laurent Tranier.

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Le blog de l'actu de l'Amérique latine, en partenariat avec :
.Les Editions Toute Latitude

6 octobre 2022 4 06 /10 /octobre /2022 09:54

  Le premier tour de l’élection présidentielle brésilienne qui s’est déroulé le 2 octobre 2022 a moins été un échec pour la candidature de large coalition de gauche et de centre-gauche de Lula da Silva (48,4 % et 57 millions de voix) qu’une confirmation de l’enracinement de Jair Bolsonaro et de l’idéologie de droite radicale qu’il véhicule – ou qui le porte.

Enracinement des idées de Bolsonaro

  Outre son score de 43,2 % et 51 millions de voix, en léger retrait par rapport à l’élection de 2018, c’est la forte progression de ses alliés, qui constitueront le groupe le plus nombreux dans chacune des deux chambres du Parlement fédéral, ainsi que dans l’élection des gouverneurs des 27 États de la fédération, qui est frappante. Victoire dès le premier tour dans les principaux États, Minas Gerais, Rio et dans le district de la capitale Brasilia. Dans l’État de Sao Paulo, le plus peuplé, le plus riche, le plus symbolique, Fernando Haddad, personnalité d’envergure nationale s’il en est puisque c’est lui qui avait « remplacé » Lula (alors emprisonné) comme candidat du Parti des Travailleurs lors de la présidentielle de 2018 avant d’être battu par Bolsonaro, est en passe d’être balayé au second tour par le candidat du bolsonarisme, Tarcisio de Freitas.

  Comment expliquer cette situation alors que s’achève un mandat présidentiel marqué par le déni face au COVID et le démarrage tardif de la vaccination, le saccage de l’environnement - et pas seulement en Amazonie - au profit de l’agronégoce et de l’exploitation sauvage des matières premières, le retour massif de la pauvreté et même de la faim dans la population, et la fragilisation de toutes les minorité, ethniques ou sexuelles ? Le tout dans un contexte de violence criminelle, policière et politique exacerbée, de corruption du pouvoir (un mal assez équitablement partagé entre les différents camps) et de marginalisation internationale du Brésil et de sa pourtant si séduisante culture ?

  Il faut bien admettre, tout d’abord, que ces sujets ne sont pas au cœur des préoccupations d’une part presque ( ?) majoritaire de la population, réellement séduite par les propos sans nuances sur la sécurité et l’autodéfense, sur les valeurs moralement conservatrices, sur les références à Dieu, à l’ordre naturel et par le discours nationaliste sur le caractère brésilien de l’Amazonie, pris à contrepied par le discours environnemental et moralisateur des Occidentaux accusés de vouloir en outre entraver le développement économique du pays.

Habileté stratégique et manipulation sans scrupules

  Il faut aussi y voir la révolution dans le débat politique à l'échelle mondiale, incarnée sinon introduite par la méthode trumpiste, qui a précarisé tous les émetteurs d’une parole de référence, médias, institutions ou personnalités indépendantes, et rendu la vérité objective insaisissable. Le résultat de cette forme de populisme qui remplace les corps intermédiaires par des relais tels que les Églises évangéliques ou des lobbies (le fameux « BBB » brésilien : lobby "bœuf, balle, bible", soit l’agrobusiness, l’armée et les détenteurs d’armes à feu et les Églises qui prospèrent) et qui s’appuie massivement sur les réseaux sociaux, offre une quasi-totale impunité aux discours mensongers, calomniateurs et outranciers. Sans possibilité de leur opposer une juste réponse. C’est ainsi que les opinions contraires trouvant de moins en moins de terrains de confrontation neutres et sereins, le débat démocratique se révèle presque impossible et la société de plus en plus profondément fracturée entre des groupes qui ne se parlent plus.

  L’habileté politique de Bolsonaro, celle de ses stratèges comme ses intuitions, ont fait le reste : comment par exemple admettre qu’arborer le drapeau brésilien soit devenu synonyme de soutien au président sortant, et que, pour la même raison, les supporters de Lula n’osent plus porter le maillot de la seleçao de foot ? Ou comment détourner à son profit les symboles les plus emblématiques du pays…

Lula, ultime rempart

  Pour autant, tout espoir est-il vain ? La victoire de Lula lors du second tour de l’élection le 30 octobre 2022, dont on peut espérer qu’elle ramènerait un peu de modération dans le débat public, est toujours possible, et même probable. Le « présidentialisme de coalition » brésilien, qui voit toujours l'exécutif trouver des compromis avec un Parlement morcelé et dominé par un centrao toujours prêt à se tourner vers le pouvoir (et ses avantages) pourrait produire un nouveau miracle majoritaire.

  Les quatre prochaines années seront forcément difficiles, les défis étant nombreux. Mais les pentes fatales pour l’environnement, les minorités, les pauvres et globalement tous les plus fragiles pourraient être enrayées.

  Il sera bien temps, après le second tour, de se pencher sur le vertige de l'après-Lula.

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4 septembre 2022 7 04 /09 /septembre /2022 12:45

Les guerres napoléoniennes en Europe ayant poussé le roi du Portugal et sa cour à la fuite vers le Brésil, celui-ci cesse dès 1808 d’être une colonie pour devenir le centre de l’Empire portugais, avec Rio pour capitale et Jean VI comme monarque.

La période troublée qui entoure le retour du roi à Lisbonne en 1821 et les velléités de rétablissement d’un contrôle colonial, depuis l’Europe, sur le vaste territoire brésilien et ses richesses, se heurtent à l’oligarchie locale et à la volonté du propre fils de Jean VI. Celui-ci proclame l’indépendance du Brésil le 7 septembre 1822 et devient l’empereur Dom Pedro Ier du Brésil. Le pays connaît ainsi un destin bien différent de celui des colonies espagnoles voisines où les élites locales ont conquis de haute lutte leur indépendance contre le royaume colonisateur.

C’est la proclamation de Dom Pedro Ier dont le Brésil célèbre le bicentenaire : au terme d’une histoire qui n’a pas connu de conflit extérieur majeur et qui a permis à l’unité nationale de cet Etat fédéral de se construire malgré son immensité et sa diversité, à l’abri de frontière naturelles bien définies et grâce à une langue qui le distingue de tous ses voisins latinos.

Au carrefour de nombreux défis intérieurs…

212 millions d’habitants, 8,5 millions de km2 : le géant latino, devenu République en 1889 après que l’esclavage a été aboli en 1888, est confronté à de nombreux défis :

  • intérieurs et institutionnels d’abord à l’approche d’une élection présidentielle de tous les dangers, les 2 et 30 octobre 2022, entre menace ouverte que fait peser le président Bolsonaro sur le respect du scrutin si le résultat lui est défavorable, et besoin de resserrer un tissu social certes très divers mais bien loin d’être inclusif, où toutes les minorités sont fragilisées.
  • économiques et sociaux dans ce pays champion de la violence et des inégalités qui est aussi le cœur de l’économie du sous-continent.
  • sur le plan de la culture et des valeurs encore, avec un soft power au potentiel immense mais qui n’ose plus s’exprimer, tant l’image du pays, en grande partie à cause de ses dirigeants dans la période récente, s’est dégradée. Le Brésil doit nous rassurer sur ses valeurs et sur son choix d’un modèle politique tolérant et ouvert, fidèle à son appartenance au monde occidental.

… et d’enjeux planétaires

Le Brésil est au centre de nombreux enjeux qui le dépassent mais sur lesquels son influence sera décisive :

  • enjeu environnemental et réchauffement climatique, à l’heure où une bien triste politique d’Etat conduit à la destruction accélérée de la forêt amazonienne, puits de carbone.
  • enjeu énergétique et des matières premières, pour ce leader agricole mondial au fort potentiel et au sous-sol riche en métaux rares que la transition énergétique rend d’autant plus précieux.
  • enjeu géopolitique enfin, entre Bolsonaro, qui a marginalisé le Brésil dans le concert des nations, et son concurrent Lula dont l’ambition Sud-Sud affichée n’éclaire pas la position que pourra adopter le pays face à la Russie ou la Chine, son premier client.

La France et l’Europe doivent se méfier des jugements hâtifs sur ce partenaire qui possède une influence certaine sur ses voisins. Quel que soit l’avenir politique du Brésil, nous devrons développer nos liens et notre connaissance mutuelle, être attentifs et à la bonne distance des agendas des pouvoirs publics et de la société civile, présents, respectueux et sans naïveté.

Un défi qu’il nous reviendra à notre tour de relever pour renforcer une relation qui nous est de plus en plus nécessaire devant les propres enjeux de notre continent.

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20 novembre 2018 2 20 /11 /novembre /2018 07:21

A quoi ressembleront les prochaines années du Brésil sous la présidence de Jair Bolsonaro, vainqueur du second tour de l'élection présidentielle du 28 octobre, avec 55,13 % des voix face à Fernando Haddad (Parti des Travailleurs) ?

Le signe des échecs et du rejet

La large victoire de Jair Bolsonaro est le signe du rejet d'un système politique partisan discrédité par sa corruption massive et son inefficacité. Cet échec, c'est celui de toute une génération politique, celle de Lula, partisans et adversaires confondus, qui n'a pas su tenir ses promesses. Avec, circonstance aggravante pour le leader historique du Parti des Travailleurs, un entêtement coupable à maintenir aussi longtemps que possible une candidature impossible, depuis la cellule de sa prison.

Cet échec, c'est celui d'une politique économique construite sur la dépense publique, c'est-à-dire la dette publique, au profit des catégories sociales les plus défavorisées dont la condition matérielle s'est certes améliorée grâce aux transferts sociaux massifs, mais sans perspectives de réelle évolution économique et sociale. C'est l'échec de la transformation du modèle productif vers plus d'efficacité et l'échec des politiques éducatives qui a conduit le piège de l'assistanat à se refermer sur les plus modestes, tout en exaspérant les plus productifs.

Cet échec, c'est enfin celui de l'Etat régalien et d'une politique sécuritaire totalement défaillante, incapable de contenir les épanchements d'une société intrinsèquement violente : violence de la grande criminalité des gangs et des trafiquants, mais aussi celle des forces de l'ordre plus ou moins corrompues et celle des rapports sociaux. Le Brésil reste, au-delà des clichés sur la légèreté, la joie de vivre, le métissage, largement raciste, sexiste, homophobe.

Le signe d'une réelle adhésion

La victoire de Jair Bolsonaro est aussi celle d'une adhésion massive à un discours aussi vague qu'imprécis, qui a porté le glaive dans toutes les plaies : sur le plan de l'économie, il lui a suffi de prendre le contre-pied des politiques actuelles en mettant en avant son conseiller économique Paulo Guedes connu pour ses convictions libérales (privatisations, retrait de l'Etat, retour à l'équilibre des finances publiques, création d'un système de retraite par capitalisation : on n'en sait guère plus sur le projet). Sur le plan de la sécurité, il lui a suffi de promettre l'immunité aux forces de l'ordre, la libéralisation du port d'armes - malgré les désastres avérés de cette pratique aux Etats-Unis par exemple - et d'envoyer des signaux explicites et scandaleux, racistes, sexistes, homophobes ou encore nostalgiques de la dictature militaire et de ses tortures.

Jair Bolsonaro est ainsi devenu le héraut du triple lobby qui domine la vie politique brésilienne, le fameux BBB ("Biblia, Balas, Buey", soit "Bible, Balles, Boeuf"), celui de l'agro-business, celui des armes, et celui des religieux évangéliques. Il est donc devenu le candidat du business, de l'ordre, de la famille et des valeurs, en un mot, "du bien contre le mal". Ajoutez à cela un coup de couteau qui a failli lui ôter la vie, mais qui lui a aussi permis d'esquiver tout débat et de démentir, preuve à l'appui, que la violence viendrait de lui.

Quels contre-pouvoirs ?

Dans un monde politique brésilien morcelé, Jair Bolsonaro, lui-même issu d'un petit parti, devrait parvenir à rallier au Congrès le marais parlementaire qui fait les majorités. La promesse de participer au partage du pouvoir - et de ses avantages - devrait suffire à lui assurer bien des soutiens dans un contexte où les nombreux partis conservateurs et ceux liés au lobby BBB occupent une place prépondérante.

La grande presse, qui appartient aux milieux d'affaires et qui a participé au discrédit de ses adversaires en le faisant apparaître comme un recours dans un univers de compromissions et de corruption, semble pour l'instant séduite par son programme libéral porté par Paulo Guedes.

L'opinion internationale sera quant à elle partagée ; il recevra peu de soutiens des nations les plus démocratiques, soucieuses des droits des minorités et de la correction du débat public. Mais il recevra certainement sans réserves celui des Etats-Unis de Donald Trump et des régimes autoritaires soucieux de commercer avec le Brésil.

Seule la Justice, dans un pays où le nombre et l'opacité des procédures n'a pas d'équivalent, pourrait entraver sa marche, telle instance protégeant la constitution ignorée, telle autre les libertés publiques bafouées... avec le risque d'une politisation croissante des jugements, tendance déjà clairement à l'oeuvre.

On le voit, malgré la stupéfaction provoquée par l'arrivée au pouvoir d'un dirigeant classé à l'extrême droite au Brésil, Jair Bolsonaro disposera d'atouts et de soutiens non négligeables pour atteindre ses objectifs. Avec toujours, dans un contexte de nostalgie affichée de la période de dictature militaire (1964-1985) et de forte présence de militaires dans son entourage (à commencer par son vice-président, l'ancien général Hamilton Mourao, Jair Bolsonaro étant lui-même un ancien capitaine de l'armée de l'air) cette sourde menace, en cas de difficultés, d'une intervention de l'armée et d'une confiscation du pouvoir par les hommes en uniforme...

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3 janvier 2012 2 03 /01 /janvier /2012 09:53

DirigeantsBRICLa moitié. En terme d'étendue géographique, de population comme de PIB, le Brésil représente la moitié de l'Amérique du Sud. Il est frontalier avec tous les pays du sous-continent, sauf l'Equateur et le Chili. Le Brésil est politiquement stable, économiquement prospère, à la pointe dans nombre d'industries, dont l'aéronautique, et il bénéficie de richesses humaines et naturelles exceptionnelles.

Une ambition globale

Le Brésil est incontournable en Amérique latine, et il compte à l'échelle du monde. Il est un exportateur collossal de denrées agricoles et de matières premières, notamment vers la Chine, son premier partenaire commercial, et il est considéré comme une grande puissance émergente : il est le B des BRIC, aux côtés de la Russie de l'Inde et de la Chine (cf. photo : de gauche à droite, le Premier ministre indien Manmohan Singh, le Président russe Dimitri Medvedev, le Président chinois Hu Jintao et Lula). N'est-il pas devenu la 6e économie mondiale à la fin 2011, avec en ligne de mire la 4e place à l'horizon 2020 ? Le Brésil a aussi certaines faiblesses internes mais, sous l'impulsion de Lula, et désormais avec Dilma Roussef, il nourrit de légitimes ambitions globales dans un monde multipolaire : il aspire à assumer certaines responsabilités politiques, c'est-à-dire en matière de maintien de la paix et de protection des droits de l'Homme, qui sont l'apanage des Grands.

Une stratégie Sud-Sud

De même que le Mexique et l'Argentine, le Brésil a intégré le G20 dès sa création au niveau des chefs d'Etat et de gouvernement en 2008. Il est candidat - tout comme l'Allemagne, l'Inde ou le Japon - a un siège permanent au Conseil de sécurité de l'ONU. Il participe activement au maintien de la paix dans le monde : il a montré sa capacité en la matière à la tête de la Minustah, la Mission des Nations Unies de stabilisation en Haïti. Intégrant les évolutions des équilibres géopolitiques mondiaux, le Brésil a misé sur le Sud : en inventant des sommets arabo-sud-américains, en instituant un dialogue à trois avec l'Inde et l'Afrique du Sud, en multipliant les rapprochements avec la Chine.

Des craintes dans son "pré carré"

Mais pour que la voix du Brésil porte autant que Lula et Dilma Roussef le souhaiteraient, le pays doit aussi se présenter comme le porte-parole d'une région unifiée. D'où son refus du Traîté de libre commerce des Amériques, imaginé par les Etats-Unis, et ses efforts permanents pour rapprocher, en matière commerciale, la Communauté andine des Nations et le Mercosur dont il est membre. D'où la création de l'UNASUR, union de la totalité des nations sud-américaines, supposée doter le sous-continent d'une véritable structure politique. D'où aussi, la méfiance qu'il suscite auprès de ses voisins, qui craignent d'être entraînés dans une dépendance économique et politique à son seul profit. D'où, enfin, l'échec jusqu'à ce jour de toutes les tentatives d'institutionnalisation de la coopération régionale et la multiplication de structures comme autant de coquilles vides.

Des positions difficiles à admettre

Les ambitions du Brésil et sa stratégie Sud-Sud peuvent aussi l'amener sur des positions difficiles à admettre par les vieilles démocraties occidentales : ainsi de sa proximité avec l'Iran d'Ahmadinejad ou de la trop longue compréhension manifestée auprès de la Libye de Kadhafi. Si l'on peut comprendre l'ambition du Brésil et son envie de renverser la table face à de vieilles puissances peu désireuses de changement, cet empressement devient de la précipitation quand il conduit au soutien de régimes non démocratiques. A moins qu'il ne faille y voir une concession au turbulent voisin, le provocateur Hugo Chavez ?

Quoi qu'il en soit, si le Brésil grimpe dans le classement des nations les plus influentes - et l'attribution de l'organisation de la Coupe du Monde de football 2014 et les JO 2016 en sont le signe -, s'il aura certainement un jour sa place aux premiers rangs, il doit mesurer le chemin qui lui reste à parcourir dans une communauté internationale certes en évolution, mais qui n'est pas prête à renier certaines valeurs qui la fondent : la paix et la sécurité, mais aussi la démocratie et les droits de l'homme, qui en sont les conditions. Il n'est ainsi plus question aujourd'hui pour les pays occidentaux d'admettre le Brésil parmi les membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU.

Retrouvez l'actu brésilienne sur le site du journal O Globo.

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12 novembre 2010 5 12 /11 /novembre /2010 17:39

DilmaRoussefVictorieuse.jpg

Elue avec 56 % des voix au second tour de l'élection présidentielle brésilienne face à José Serra, Dilma Rousseff est la nouvelle femme forte du Brésil. Lula a gagné son pari : il pourra quitter son fauteuil présidentiel le 31 décembre 2010 avec le sentiment du devoir accompli, celui de laisser le pays entre les mains de celle qu'il a lui-même choisie.

Dilma ne manque pas d'atouts au moment d'entrer dans sa nouvelle fonction : une élection confortable, une forte majorité au Parlement, une situation économique, sociale, mais aussi diplomatique, plus que favorable.

Quel est le projet de Dilma ?

Le projet de Dilma Rousseff tient en seul mot : la continuité. Elle ne s'en est jamais cachée, elle s'inspirera en tous points de Lula, qui a pratiquement réduit de moitié la pauvreté au Brésil. Mais il reste aujourd'hui 30 millions de pauvres et Dilma va d'abord s'efforcer de les faire sortir de cette situation. Cela passe par la poursuite de la politique de "bourses" sociales et par les "grands travaux", le fameux Programme d'Accélération de la Croissance dont elle avait d'ailleurs la charge aux côtés de Lula : construction de logements, assainissement, services de santé, éducation. Mais aussi mise en place d'infrastructures routières et de transport, de télécommunications et de production d'énergie...

Quels écueils peut-elle rencontrer ?

Croire que la belle histoire va se poursuivre sans accrocs est certainement illusoire. Le Brésil souffre aussi d'un certain nombre de problèmes que cette élection a d'ailleurs permis de mettre au jour. La percée inattendue de Marina Silva au premier tour, candidate écologiste et troisième dame de l'élection avec 19,3 % des suffrages, souligne en particulier deux lacunes du bilan de Lula que Dilma Rousseff devra combler : l'attente des électeurs en matière de préservation de l'environnement et de développement durable d'une part ; l'exigence reconnue par tous de lutter contre la corruption du personnel politique et de l'administration d'autre part. Il ne s'agit pas là de questions anodines ou secondaires. Mais d'enjeux forts, sur lesquels une nouvelle candidature de Marina Silva pourrait prospérer jusqu'à la prochaine élection présidentielle s'ils ne sont pas traités par Dilma. Car une double faille, nouvelle dans l'histoire du Brésil, est apparue au sein du corps électoral : si les pauvres ont largement plébiscité Dilma, les classes les plus aisées ont voté pour son adversaire José Serra. Un clivage sociologique qui recoupe la géographie sociale du pays, avec un Nord défavorisé qui a massivement choisi Dilma et un Sud plus prospère qui a majoritairement voté pour son adversaire.

Enfin, autre mal majeur dont souffre le Brésil : une insécurité qui reste à des niveaux record. Une compétence qui relève aussi des Etats fédérés qui font des efforts pour éradiquer la criminalité, mais dont devra s'emparer Dilma pour que les deux grands rendez-vous du pays dans les années 2010 soient un succès : la Coupe du Monde de football en 2014 et les Jeux Olympiques de Rio en 2016.

Seul le premier de ces deux événements se déroulera durant le mandat de 4 ans de Dilma Rousseff, mais gageons que de sa réussite ou de son échec dépendra grandement le résultat de la prochaine échéance présidentielle, prévue en 2014...

Retrouvez l'actu brésilienne sur le site du journal O Globo.

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29 octobre 2010 5 29 /10 /octobre /2010 11:38

Choiseul-ProblemesAmeriqueLatine78.jpgLuis Inacio "Lula" Da Silva s'apprête à quitter le présidence brésilienne avec un taux d'approbation aux environs de 80% de son bilan de 8 années à la tête de l'Etat. La réduction considérable de la pauvreté, la croissance économique soutenue et l'installation du Brésil au premier plan sur la scène latino-américaine et internationale en sont les raisons principales, même si son bilan connaît aussi, nécessairement, certaines limites, en particulier dans le domaine de la morale publique et de la préservation de l'environnement.

Le nouveau regard porté sur le pays, son rôle de puissance internationale, la place du Parti des travailleurs dont est issu Lula, la société de consommation, la diversité culturelle : c'est à un état des lieux complet que nous invite le 78e numéro de la revue Problèmes d'Amérique latine, intitulé Le Brésil au sortir des années Lula. Pierre Salama propose notamment une excellente analyse du subtil et fructueux équilibre maintenu par Lula en matière de politiques économiques : où comment concilier l'orthodoxie monétariste (taux d'intérêts élevés, faible inflation, maîtrise de la dépense publique) destinée à redonner au pays son indépendance économique, avec les attentes de la population en matière de transferts sociaux et d'investissements publics ? Réponse : en pariant que la demande intérieure permettra de relancer l'investissement productif privé afin de trouver un relais qualifié à une croissance dopée par les exportations du secteur primaire...

A lire, le numéro 78 (Automne 2010) de la revue Problèmes d'Amérique latine - Le Brésil au sortir des années Lula.

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6 octobre 2010 3 06 /10 /octobre /2010 09:35

DilmaR-JoseS-MarinaS.jpg20 points de retard dans les intentions de vote en mai 2009 sur son principal adversaire, José Serra ; 11 points de retard à mi-février ; plus que 3 points de retard à la fin mars... et un triomphe au premier tour avec 53 % des suffrages annoncé une semaine avant l'échéance ! La chronique de l'élection annoncée de Dilma Rousseff, choisie par Luiz Inacio Lula da Silva pour lui succéder à la tête de l'Etat brésilien a connu un seul accroc...

Dilma : une relative déception au soir du premier tour

Dimanche 3 octobre 2010, le jour du premier tour de scrutin, "seulement" 46,9 % des électeurs ont glissé le nom de l'ancienne plus proche collaboratrice de Lula dans l'enveloppe, et 32,6 % celui de son principal rival, Jose Serra... Est-ce un réel échec ? Pas vraiment si l'on se souvient d'où est partie Dilma Rousseff, quasi-inconnue du grand public il y a 18 mois, et qui se confronte pour la première fois de sa vie au suffrage universel. Elle devance ainsi un habitué des joutes électorales, ancien maire et ancien gouverneur de Sao Paulo, ancien député et ancien ministre, José Serra qui, à 68 ans, est probablement en train de laisser passer sa dernière chance d'accéder à la fonction suprême. Tout de même, si l'on considère l'incroyable variété de moyens déployés sans compter par Lula et son équipe pour "transférer" à Dilma une partie de la notoriété et de l'affection que voue le peuple brésilien à son président sortant - dont l'action est approuvée par plus de 80 % de ses concitoyens ! - on ne peut que constater, sinon l'échec relatif, du moins une certaine déception devant ce résultat...

Les limites de l'excellent bilan de Lula

Quelle peut bien en être la raison ? On ne peut pas reprocher à Dilma de ne pas être aussi aimée que Lula, qui arrive au terme de deux mandats conclus sur un bilan excellent au plan économique et social, avec un taux d'approbation exceptionnel à l'échelle internationale. En revanche, le résultat de ce premier tour souligne les deux limites de l'action de Lula. Car c'est bien lui qui reste au centre de tous les enjeux touchant à cette élection. Les 6 points perdus par Dilma dans la dernière semaine de campagne ont été gagnés par la surprise de cette élection, le score inattandu de 19,3 % obtenu par Marina Silva, ancienne Ministre de l'Environnement de Lula et candidate du parti Vert après qu'elle ait claqué la porte du gouvernement et du Parti des Travailleurs, le PT de Lula pour insuffisance d'ambition écologique... Lula ne s'est jamais caché de préférer le développement humain à la préservation absolue de l'environnement, les barrages et l'exploitation raisonnée de la forêt et des richesses naturelles aux sanctuaires inviolables. Sa priorité a été de sortir un maximum de Brésiliens de la pauvreté et il a obtenu des résultats spectaculaires en la matière : sous ses deux mandatures, 20 millions de Brésiliens ont quitté la catégorie des pauvres pour accéder à la classe moyenne et les plus défavorisés ont retrouvé la dignité et l'espoir. Les arguments de Marina Silva, sur le thème du développement, certes, mais durable, et ses critiques des grands programmes d'infrastructures insuffisamment protecteurs de l'environnement ont porté.

Exigence environnementale et morale

De même, la rectitude morale dont elle a toujours fait preuve, semble avoir impressionné un électorat urbain et éduqué choqué par les scandales à répétition ayant touché l'entourage de Lula durant ses huit années de mandat. La démission le 16 septembre de la Directrice de cabinet de Lula, Erenice Guerra, soupçonnée de trafic d'influence, n'est qu'un nouvel épisode dans une trop longue série... Il est venu rappeler au plus mauvais moment pour Dilma les travers de sa famille politique. Marina Silva est ainsi arrivée en tête de l'élection dans un seul Etat, le District de Brasilia, siège du pouvoir fédéral ! Est-ce à dire que Dilma peut être battue lors du second tour, le dimanche 31 octobre ? Probablement pas, sauf cataclisme politico-judiciaire dans l'intervalle. Simplement, de nouvelles attentes sociales s'expriment avec force au Brésil, sur le plan environnemental et éthique. C'est le signe que le Brésil est bien en train de changer, ne se préoccupant plus seulement de ses besoins primaires. C'est aussi la confirmation que, pour Dilma Rousseff, au lendemain du second tour, le plus dur ne fera que commencer...

Retrouvez les résultats complets du 1er tour, Etat par Etat, sur globo.com.

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24 avril 2010 6 24 /04 /avril /2010 10:05

BrasilUmPaisDeTodos.jpgAprès une année de stagnation (-0,4 % selon le FMI), le Brésil devrait renouer avec une croissance de son PIB proche de 5 % en 2010, soit son niveau moyen depuis l'arrivée de Lula au pouvoir en 2002. "Le pays connaît une excellente période", comme le dit d'ailleurs le Président brésilien. Même s'ils montrent effectivement que la pauvreté recule, il ne s'agirait cependant pas de se satisfaire des indices du jour : le gouvernement brésilien doit aussi penser au lendemain... 

En 2007, Lula a chargé Dilma Rousseff de la conduite du Programme d'Accélération de la Croissance (PAC) doté de 100 milliards d'Euros sur quatre ans. Cet apport d'argent public et privé dans les infrastructures du pays était destiné à "stimuler les secteurs productifs" afin de dégager des bénéfices sociaux sur tout le territoire. La mission est à peu près remplie : le secteur de l'énergie, les transports, l'urbanisme ont connu un réel essor, générant 5,5 millions d'emplois,même si 40 % des projets n'ont pas encore démarré. 

PAC 2, le retour en force ! 

La loi électorale brésilienne impose aux candidats à la Présidence de quitter toute fonction officielle six mois avant l'élection. C'est donc à quelques heures de son départ du cabinet Lula que Dilma Rousseff, celle qu'il a choisie pour lui succéder lors de la prochaine élection, les 3 et 31 octobre 2010 a présenté le PAC numéro 2, doté de... 660 milliards d'Euros sur 6 ans ! Est prévue la création de 6 000 crèches, le raccordement des 20 % de brésiliens ne disposant pas d'eau courante et des 60 % sans assainissement, ainsi que d'importants investissements dans la santé, l'enseignement, l'énergie, les infrastructures, dans ce pays qui recevra la Coupe du Monde en 2014 et les Jeux olympiques en 2016 : les besoins du pays restent considérables et les effets de ce programme, s'il se déploie jusqu'à son terme, promettent d'être spectaculaires. 

La meilleure garantie qu'il aboutisse est... que Dilma Rousseff soit effectivement élue présidente en octobre 2010. L'opposition ne manque d'ailleurs pas de critiquer l'électoralisme, l'irréalisme, l'insincérité de ce colossal programme. Ce qui n'empêche pas la candidate de poursuivre son ascencion dans les intentions de vote : 20 points de retard en mai 2009 sur son principal adversaire, José Serra, qui vient de quitter le poste de gouverneur de l'Etat de Sao Paulo ; 11 points de retard à mi-février. Fin mars, un nouveau sondage place Jose Serra à 34 % des intentions de vote au premier tour et Dilma Rousseff à... 31 % ! 

Programa de Aceleração do Crescimento 2 (PAC 2)

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24 février 2010 3 24 /02 /février /2010 09:05

LulaRoussefLuiz Inacio Lula da Silva, universellement connu par son diminutif "Lula", élu Président de la République fédérative du Brésil en 2002, réélu en 2006 avec 60 % des suffrages, ne sera pas de nouveau candidat à sa succession les 3 et 31 octobre 2010. La constitution brésilienne limite en effet à deux le nombre de mandats successifs d'un président.

Lula, le président du renouveau brésilien, le champion des pays émergents et le héraut de la justice sociale alliée à un solide pragmatisme, bénéficie aujourd'hui de 76 % d'opinions favorables dans son pays : un record. Son départ laissera un grand vide.

Qui est Dilma Rousseff ?

DilmaRoussef.jpgLe dernier défi d'homme d'Etat de Lula sera de laisser son pays entre les mains d'une personnalié digne de lui succéder : "un bon gouvernement doit conduire son successeur à la victoire" a-t-il prédit. Son successeur, il l'a choisi lui-même et il le prépare aux hautes responsabilités qui l'attendent. L'heureuse candidate sera Dilma Rousseff : à 62 ans, cette fille d'un avocat communiste d'origine bulgare, membre de la guérilla sous la dictature militaire, emprisonnée de 1970 à 1973 et torturée, a rejoint le Parti des Travailleurs (PT) de Lula en 2000 alors qu'elle est chargée des mines et de l'énergie dans l'Etat de Rio Grande do Sul. En 2003, Lula la nomme Ministre de l'Energie à l'échelon fédéral avant de la désigner Ministre de la Maison civile en 2005, un rôle clef à ses côtés, presque équivalent à celui d'un Premier ministre. Très vite choisie par Lula pour être en 2010 la candidate de la coalition conduite par le PT, elle prend une importance croissante dans le dispositif gouvernemental, étant présentée comme la "mère du PAC", le Plan d'Accélération de la Croissance qui prévoit une série d'investissements publics dans les secteurs stratégiques.

Exigeante, tenace, autoritaire, intelligente, bonne gestionnaire : si on lui prête un grand nombre de qualités, elle n'a cependant pas le charisme de Lula et n'a jamais été candidate à une élection. En 2009, elle a surmonté un cancer du système lymphatique, ce qui a contribué à adoucir son image. Un peu de chirurgie esthétique, l'abandon de ses lunettes au profit de lentilles de contact et un soin accru apporté à son maquillage... Dilma fait ce qu'il faut pour séduire les électeurs.

L'inconnue électorale

Désignée officiellement par le PT le 20 février pour être sa représentante lors du scrutin d'octobre 2010, Dilma Rousseff n'est pas actuellement la favorite des sondages : la candidate de la continuité de gauche modérée est, à la mi-février, 11 points derrière son principal adversaire, le gouverneur de l'Etat de Sao Paulo, José Serra (centre-droit). Mais la tendance lui est favorable : en mai 2009, elle accusait 20 points de retard...

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14 octobre 2009 3 14 /10 /octobre /2009 08:27
Le 3 octobre 2009, au troisième tour de scrutin, après que Chicago puis Tokyo aient été éliminées, le Comité International Olympique (CIO) a attribué l'organisation des Jeux Olympiques 2016 à Rio de Janeiro par 66 voix contre 32 à Madrid.

C'est un nouveau triomphe pour le Brésil et pour Lula, son président qui, défendant sa candidature devant le CIO, affirmait que "le pays connaît une excellente période (...). Nous avons une économie forte et dynamique qui a surmonté la crise (...), nous vivons dans une ambiance de liberté, de démocratie (...). L'heure du Brésil a sonné !"

Coupe du monde 2014 et JO 2016 !

Après la Chine avec les JO de Pékin en 2008, après l'Afrique du Sud qui accueille la Coupe du Monde de football en 2010, l'attribution des JO 2016 à Rio de Janeiro confirme le rôle géopolitique du sport, et de ses deux événements planétaires, dans l'accompagnement de l'évolution des équilibres mondiaux... Une évolution très favorable au Brésil si l'on se souvient que le pays accueillera aussi la Coupe du Monde de football en 2014 !

C'est donc un double défi qui attend le Brésil des années 2010 : un défi qui va le projeter durablement sur le devant de la scène et lui demander un effort d'investissement considérable. L'enjeu est que cet effort national sur les infrastructures sportives, de transports, d'hébergements, de télécommunications, etc. lui donne les bases d'une prospérité et un élan qui se prolonge au-delà de l'euphorie olympique.

Quelle sera alors la place du Brésil, qui exerce d'ores et déjà le leadership de son continent dont il représente la moitié de la richesse, de la population et de la superficie ? "Cette candidature n'est pas seulement la nôtre. C'est aussi celle de l'Amérique du Sud", affirme Lula. Certes, cette succession d'événements sera un puissant éclairage sur la région. Attention cependant pour le Brésil à ne pas laisser que des miettes à ses voisins : ils sont suffisamment turbulents pour lui faire payer cher toute prétention à l'hégémonie...

Le problème de la criminalité

Mais le plus grand défi auquel est confronté le Brésil à l'approche de la double échéance de 2014 et de 2016 est celui de la criminalité. Si le pays est aujourd'hui parmi les 10 premières économies mondiales et si Lula peut là encore se féliciter que le G20 de Pittsburgh ait dessiné "une nouvelle carte économique du monde qui reconnaît l'importance de pays émergents tels que le Brésil" et s'il peut être fier que "le Brésil fasse partie de la solution" à la crise économique mondiale, c'est là le grand problème qui sépare encore les pays émergents des pays les plus riches. Si la pauvreté recule rapidement, si le niveau de vie moyen des brésiliens augmente, la criminalité reste à des niveaux inacceptables pour des Européens.

Mais le Brésil dispose de tellement de ressources et d'une telle vitalité qu'il est parfaitement capable de trouver en quelques années les solutions à ce problème : c'est en tout cas le message de confiance que les membres du CIO ont souhaité lui envoyer...

L'une des vidéos promotionnelles présentées par le Comité Rio 2016 :

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