A l'échelle de l'Amérique latine, le secteur agricole, en pleine évolution, emprunte trois directions bien distinctes.
La première, portée à la fois par la demande internationale et par la volonté politique des Etats, est celle du modèle agro-industriel, celui de l'innovation, de l'intensification et de l'extension. Il positionne l'Argentine ou le Brésil comme des puissances agricoles de dimension planéraire, fortement exportatrices, et s'avère être un important pourvoyeur de devises. Nous connaissons le revers de la médaille, celui de l'apauvrissement des sols à force de monoculture, par exemple celle du soja (cf. photo : la récolte du soja au Brésil), et celui de la déforestation. Celui aussi d'une désertification des campagnes au profit d'"agrovilles" où se concentre l'activité d'amont et d'aval, et d'un risque paradoxal pesant sur la sécurité alimentaire.
Un modèle traditionnel condamné
La deuxième, que l'on rencontre dans la zone andine et en Amérique centrale, perpétue le modèle ancien de la micro-exploitation vivrière gérée par les communautés. Ce modèle faiblement productif, à l'écart des circuits commercaux, est aujourd'hui une impasse pour des populations ainsi maintenues dans la pauvreté voire la malnutrition. Il semble condamné à moyen terme.
Une polyculture à taille humaine et forte valeur ajoutée
La troisième voie peut, par certains aspects, être rapprochée de l'orientation prise par nos zones de bocage ou de semi-montagne d'Europe, où une agriculture à grande échelle n'est pas possible. Elle s'organise autour d'exploitations de taille familiale intégrées dans le circuit commercial et utilisant des techniques modernes au services de productions valorisées à travers des circuits courts locaux ou des labels qualité. Il en va ainsi de productions maraîchères, d'agriculture équitable, bio, sous signe de qualité ou d'origine contrôlée, comme certains vins argentins, cafés brésiliens, la quinoa bolivienne, les fleurs coupées de Colombie ou d'Equateur...
Des OGM pour réduire la pollution des sols
Grands espaces, faible densité de population, richesse des sols, abondance de l'eau... Le sous-continent latino-américain est d'ores et déjà un géant du secteur agricole. Son potentiel reste colossal, ce qui est rassurant quand l'on sait que la demande mondiale augmentera de 50% d'ici à 2050. Des réponses devront être trouvées sur l'organisation des approvisionnements et la stabilité des prix du marché intérieur. La compétitivité extérieure ne sera menacée que si le caractère durable de la production intensive n'est pas assuré. Sur ce point, le choix de cultures OGM relève davantage de la solution que du problème, tant il permet de réduire les intrants et la pollution des sols.
A lire : Mondes émergents 2011 - L'Amérique latine est bien partie. En particulier la contribution de Martine Guibert et Sébastien Velut, "Les agricultures latino-américaines : dynamiques et enjeux de développement".