20 points de retard dans les intentions de vote en mai 2009 sur son principal adversaire, José Serra ; 11 points de retard à mi-février ; plus que 3 points de retard à la fin mars... et un triomphe au premier tour avec 53 % des suffrages annoncé une semaine avant l'échéance ! La chronique de l'élection annoncée de Dilma Rousseff, choisie par Luiz Inacio Lula da Silva pour lui succéder à la tête de l'Etat brésilien a connu un seul accroc...
Dilma : une relative déception au soir du premier tour
Dimanche 3 octobre 2010, le jour du premier tour de scrutin, "seulement" 46,9 % des électeurs ont glissé le nom de l'ancienne plus proche collaboratrice de Lula dans l'enveloppe, et 32,6 % celui de son principal rival, Jose Serra... Est-ce un réel échec ? Pas vraiment si l'on se souvient d'où est partie Dilma Rousseff, quasi-inconnue du grand public il y a 18 mois, et qui se confronte pour la première fois de sa vie au suffrage universel. Elle devance ainsi un habitué des joutes électorales, ancien maire et ancien gouverneur de Sao Paulo, ancien député et ancien ministre, José Serra qui, à 68 ans, est probablement en train de laisser passer sa dernière chance d'accéder à la fonction suprême. Tout de même, si l'on considère l'incroyable variété de moyens déployés sans compter par Lula et son équipe pour "transférer" à Dilma une partie de la notoriété et de l'affection que voue le peuple brésilien à son président sortant - dont l'action est approuvée par plus de 80 % de ses concitoyens ! - on ne peut que constater, sinon l'échec relatif, du moins une certaine déception devant ce résultat...
Les limites de l'excellent bilan de Lula
Quelle peut bien en être la raison ? On ne peut pas reprocher à Dilma de ne pas être aussi aimée que Lula, qui arrive au terme de deux mandats conclus sur un bilan excellent au plan économique et social, avec un taux d'approbation exceptionnel à l'échelle internationale. En revanche, le résultat de ce premier tour souligne les deux limites de l'action de Lula. Car c'est bien lui qui reste au centre de tous les enjeux touchant à cette élection. Les 6 points perdus par Dilma dans la dernière semaine de campagne ont été gagnés par la surprise de cette élection, le score inattandu de 19,3 % obtenu par Marina Silva, ancienne Ministre de l'Environnement de Lula et candidate du parti Vert après qu'elle ait claqué la porte du gouvernement et du Parti des Travailleurs, le PT de Lula pour insuffisance d'ambition écologique... Lula ne s'est jamais caché de préférer le développement humain à la préservation absolue de l'environnement, les barrages et l'exploitation raisonnée de la forêt et des richesses naturelles aux sanctuaires inviolables. Sa priorité a été de sortir un maximum de Brésiliens de la pauvreté et il a obtenu des résultats spectaculaires en la matière : sous ses deux mandatures, 20 millions de Brésiliens ont quitté la catégorie des pauvres pour accéder à la classe moyenne et les plus défavorisés ont retrouvé la dignité et l'espoir. Les arguments de Marina Silva, sur le thème du développement, certes, mais durable, et ses critiques des grands programmes d'infrastructures insuffisamment protecteurs de l'environnement ont porté.
Exigence environnementale et morale
De même, la rectitude morale dont elle a toujours fait preuve, semble avoir impressionné un électorat urbain et éduqué choqué par les scandales à répétition ayant touché l'entourage de Lula durant ses huit années de mandat. La démission le 16 septembre de la Directrice de cabinet de Lula, Erenice Guerra, soupçonnée de trafic d'influence, n'est qu'un nouvel épisode dans une trop longue série... Il est venu rappeler au plus mauvais moment pour Dilma les travers de sa famille politique. Marina Silva est ainsi arrivée en tête de l'élection dans un seul Etat, le District de Brasilia, siège du pouvoir fédéral ! Est-ce à dire que Dilma peut être battue lors du second tour, le dimanche 31 octobre ? Probablement pas, sauf cataclisme politico-judiciaire dans l'intervalle. Simplement, de nouvelles attentes sociales s'expriment avec force au Brésil, sur le plan environnemental et éthique. C'est le signe que le Brésil est bien en train de changer, ne se préoccupant plus seulement de ses besoins primaires. C'est aussi la confirmation que, pour Dilma Rousseff, au lendemain du second tour, le plus dur ne fera que commencer...
Retrouvez les résultats complets du 1er tour, Etat par Etat, sur globo.com.